Le Dhamma de la Forêt


Arrêtez-vous simplement ici

Upasika Kee Nanayon


Traduction de Jeanne Schut

http://www.dhammadelaforet.org/


Extrait de Pure and Simple - chapitre 20


Nous nous réunissons aujourd’hui, comme d’habitude, pour parler de notre pratique de la méditation.

Nous avons suffisamment développé la vision intérieure pour que la connaissance jaillisse d’une authentique pratique de l’attention et cela nous a fait réaliser que c’est un processus qui dissipe la souffrance et les poisons du mental. A chaque fois que l’attention faiblit et que nous nous saisissons d’une quelconque idée, notre pratique – qui consiste à lire en nous-mêmes d’instant en instant – nous permet de rapidement prendre conscience de ce qui se passe. Cela nous aide à garder le contrôle de l’esprit et fait énormément de bien. Pourtant, ce n’est pas suffisant parce que tout ce qui concerne la souffrance et les poisons mentaux est extrêmement complexe et profondément enfoui en nous. Nous devons donc méditer et examiner les choses tout au fond de nous.

Regarder à l’extérieur est une chose que nous savons déjà faire et il est aisé de constater que, lorsque nous nous intéressons à des choses extérieures à nous, notre esprit est tout agité au lieu d’être libre et paisible. Voilà pourquoi nous devons maintenir l’esprit dans son état de neutralité ou d’attention centrée. Ensuite, grâce à notre expérience dans la pratique, nous pouvons faire notre évaluation : quel état d’esprit avons-nous été capables de maintenir ? Notre attention a-t-elle été continue dans toutes nos activités ? Voilà les choses auxquelles nous devons être attentifs en utilisant toutes nos facultés d’observation. Quand l’esprit n’est plus présent et centré à cause de fabrications mentales, quand il crée le chaos à force de penser, comme il le fait si souvent, que pouvons-nous faire pour l’obliger à se poser et se calmer ? S’il ne se calme pas, il ne va créer que de la souffrance à vagabonder, imaginer et se saisir de toutes sortes d’idées. Voilà ce qu’est la souffrance. Vous devez pouvoir déchiffrer tout cela en vous à tout moment, voir clairement en quoi ces choses sont impermanentes, changeantes et sources de souffrance.

Si vous comprenez la nature de l’apparition et de la disparition des phénomènes en vous tournant vers l’intérieur pour voir ces apparitions et disparitions en vous, vous réaliserez que l’impermanence n’est ni une bonne ni une mauvaise chose. C’est simplement un processus naturel d’apparition, de prolongement et de disparition. Essayez de voir cela en profondeur et vous balayerez tous les poisons de votre esprit. C’est exactement comme quand vous balayez si régulièrement votre maison que, si une saleté se dépose, vous la détectez aussitôt. A chaque instant, nous devons donc balayer tout ce qui peut apparaître, durer puis passer. Laissez tout passer sans vous emparer ou vous saisir de quoi que ce soit. Faites en sorte que l’esprit soit conscient de cet état de non-attachement qui l’habite ; qu’il voie que, quand il ne s’attache à rien, ne se saisit de rien, il n’est pas bouleversé ; il est libre et paisible.

Cet état de conscience est extrêmement précieux car il ne nécessite pas beaucoup de connaissances. Il vous suffit d’observer pour voir que tout change : les formes, les sensations, les perceptions, les pensées et la conscience sensorielle. Vous pouvez aussi observer tout ce qui peut préoccuper l’esprit et voir comment tout cela change continuellement : une idée arrive puis disparaît à chaque instant. C’est une chose que vous devez observer jusqu’à en avoir une compréhension réelle. Sinon, vous vous laisserez attirer par vos préoccupations, selon la façon dont vous aurez interprété les contacts sensoriels. Et si vous ne vous laissez pas attirer par des contacts sensoriels, ce sera par des souvenirs ou des pensées. Voilà pourquoi vous devez entraîner l’esprit à rester fermement centré dans la neutralité, sans vous saisir de quoi que ce soit. Si vous parvenez à maintenir cet état de concentration sur un point unique en continu, vous balayerez tout ce qui traîne dans l’esprit, vous évacuerez son insatisfaction et sa souffrance immédiatement et à tout moment.

Tout apparaît puis disparaît, apparaît puis disparaît – tout ! Ne vous saisissez de rien en pensant que c’est bon ou mauvais ou en croyant qu’il s’agit de « vous ». Arrêtez toutes les élucubrations et les fabrications mentales. Quand vous pourrez maintenir cet état de présence consciente, l’esprit se calmera de lui-même, il deviendra tout naturellement vide et libre. Si des pensées se présentent, voyez qu’elles ne font que passer, ne vous en saisissez pas. Quand vous êtes capable de voir les aspects de l’esprit qui apparaissent et disparaissent, il n’y a pas grand-chose d’autre à faire : continuez à les observer et à lâcher prise en vous-même et il n’y aura pas de trains de pensées interminables sur le passé ou l’avenir. Ils se limiteront tous à apparaître puis disparaître.

Quand vous voyez vraiment le présent avec ses apparitions et ses disparitions, il n’y a plus de problèmes graves. Tout ce qui peut arriver finira par passer. Par contre, si vous n’arrivez pas à le voir passer, vous vous saisirez de tout ce qui se présente et tout se transformera en un chaos d’images incessantes. Il faut donc absolument arrêter net ces formations de pensées qui ne cessent d’affluer. Soyez bien présent à l’intérieur de vous puis fixez toute votre attention sur votre esprit. Vous serez alors en mesure de calmer le flot des pensées qui vous distrayait. C’est une chose que vous pouvez faire à tout moment et, à chaque fois, l’esprit s’apaisera, deviendra libre, délié, détaché. Vous devrez alors veiller constamment à ce qu’il demeure dans cet état « normal » à chaque fois qu’il est sur le point de se laisser emporter dans de longs trains de pensées. Dès que vous en serez conscient, arrêtez-les et les choses se dissiperont sur-le-champ. Quel que soit le sujet de ces pensées, dissipez-les immédiatement. Pratiquez ainsi jusqu’à devenir expert et l’esprit ne se laissera plus entraîner dans des distractions.

C’est comme conduire une voiture : quand vous voulez arrêter, appuyez à fond sur les freins et vous vous arrêtez immédiatement. Le même principe s’applique à l’esprit. Vous verrez que, quel que soit le moment, dès que l’attention est présente, l’esprit cesse de vagabonder et s’immobilise. En d’autres termes, quand l’attention est fermement centrée, quoi qu’il puisse arriver, dès que vous en êtes clairement conscient, l’esprit s’arrête, se désengage et se libère. C’est une méthode vraiment très simple : tout s’arrête dès que vous êtes présent et attentif. Toute autre méthode serait trop lente pour réussir. Cette technique pour vous observer, vous connaître, vaut vraiment la peine d’être connue car tout le monde peut l’appliquer à tout moment. Même maintenant, tandis que je parle et que vous écoutez, concentrez simplement votre attention sur l’esprit, tel qu’il est en cet instant. C’est un excellent moyen de connaître votre propre esprit.

Avant de savoir tout cela, nous laissions l’esprit courir après toutes les pensées qui lui venaient, reprenant une nouvelle pensée dès que la précédente disparaissait, fabriquant ainsi de véritables toiles d’araignée qui nous piégeaient dans toutes sortes de complications. Toutes les techniques de méditation que nous avions essayées n’avaient pas réussi à arrêter le vagabondage de notre esprit. Alors ne sous-estimez pas cette méthode en la croyant trop simple. Entraînez-vous à repérer tout objet qui entre en contact avec votre attention ou toute opinion qui essaie de s’imposer à elle. Quand le « moi » et les opinions s’extériorisent, criez : « Stop ! Laissez-moi finir d’abord ! » Cette façon de stopper les choses peut vraiment calmer immédiatement les poisons mentaux, même quand cela ressemble à un dialogue où chacun essaie d’interrompre l’autre, où la vanité – le sentiment d’être un « moi » – s’empresse d’élever des objections avant que l’autre ait fini de s’exprimer. On pourrait dire aussi que c’est comme tomber sur une bête dangereuse – un tigre ou un serpent venimeux – sans pouvoir s’échapper. Dans ce cas, la seule chose qu’il reste à faire, c’est de s’arrêter, tout simplement, de rester complètement immobile et d’émettre des pensées de bienveillance en direction de la bête en question.

C’est valable ici aussi : en vous arrêtant, tout simplement, vous sapez la force des poisons mentaux ou de tout sentiment de « moi » qui serait apparu. Nous devons arrêter net les poisons mentaux car, si nous ne le faisons pas, ils se renforceront et continueront à s’intensifier. Nous devons donc les arrêter dès le départ. Y résister dès le départ. Ainsi votre attention s’habituera à les maîtriser. Dès que vous dites : « Stop ! » les choses s’arrêtent immédiatement. Les poisons mentaux vont devenir obéissants et n’oseront plus vous manipuler d’une manière ou d’une autre.

Si vous vous asseyez pour méditer une heure, assurez-vous de porter tout le temps votre attention très précisément à l’esprit. Ne vous limitez pas à espérer passer un moment paisible. Asseyez-vous et observez les sensations à l’intérieur de l’esprit pour voir à quel point il est centré. Ne vous intéressez à aucun désir ou aucun sentiment qui pourrait apparaître. Même si la douleur apparaît, sous quelque forme que ce soit, ne lui accordez aucune attention. Continuez à diriger votre attention à l’esprit centré dans sa normalité, tout le temps. L’esprit ne s’égarera pas vers des choses agréables ou douloureuses ; il les lâchera toutes. Il verra la douleur comme un problème des agrégats parce que les agrégats sont changeants ; les sensations sont changeantes et le corps change tout le temps. C’est ainsi qu’ils doivent être.

Quand une sensation agréable apparaît, le désir – sans cesse à la recherche de plaisir – est satisfait et veut maintenir ce plaisir aussi longtemps que possible. Mais quand il s’agit de douleur, il fait exactement le contraire parce que la douleur fait mal. Quand la douleur apparaît parce que nous sommes restés assis longtemps, l’esprit s’agite car le désir le pousse à bouger. Il veut changer les choses d’une manière ou d’une autre. Ce que nous devons faire, plutôt, c’est nous entraîner à faire disparaître le désir. Si la douleur du corps grandit, nous devons pratiquer l’équanimité, rester tranquilles, en réalisant que ce sont les agrégats qui ont mal, pas nous. Au bout d’un moment, l’esprit cessera de s’agiter et il pourra revenir à son état normal d’équanimité.

Même si l’équanimité n’est pas totale, ne vous en inquiétez pas. Assurez-vous simplement que l’esprit ne lutte pas pour changer la situation. Continuez à lâcher la résistance, le désir. Si la douleur est tellement insupportable que vous devez bouger, ne bougez pas pendant que l’esprit est très agité. Restez immobile, voyez jusqu’où la douleur peut aller et ne changez de position que lorsque le moment propice arrivera. A ce moment-là, quand vous étirez vos jambes, veillez à ce que l’esprit reste centré, toujours dans l’équanimité. Restez ainsi pendant environ cinq minutes et la violente douleur passera. Mais attention : quand une sensation agréable remplace la douleur, l’esprit s’en délecte. Vous devez donc utiliser l’attention pour maintenir la neutralité et l’équanimité de l’esprit.

Essayez de pratiquer ainsi dans toutes vos activités parce que l’esprit a tendance à se laisser absorber par des sensations agréables. Il peut même se laisser absorber par des sensations neutres. Vous devez donc garder votre attention fermement ancrée et rester conscient de la véritable nature des sensations : elles sont changeantes et causes de souffrance, porteuses d’aucun réel plaisir. Observez les sensations agréables pour voir qu’elles ne sont que souffrance. Vous devez faire cela à tout moment. Ne tombez pas sous le charme des sensations agréables sinon vous tomberez dans toujours plus d’insatisfaction et de souffrance. En effet, le désir ne recherche que le plaisir alors que les agrégats n’ont aucun plaisir à offrir. Les agrégats physiques et mentaux sont tous porteurs de souffrance. Si l’esprit peut s’élever au-dessus du plaisir, au-dessus de la douleur, au-dessus des sensations, c’est précisément là qu’il trouve la libération. Comprenez bien qu’il s’agit de la libération des sensations. Si l’esprit ne s’est pas encore libéré des sensations, s’il réclame toujours du plaisir et s’attache encore au plaisir et à la douleur, essayez de prendre conscience de son état dans les moments où il n’éprouve rien de spécial, où il est neutre. Cela lui permettra de se libérer de l’insatisfaction et de la souffrance.

Nous devons donc beaucoup pratiquer avec les sensations de douleur physique et, en même temps, faire un effort pour comprendre également les sensations agréables car les sensations agréables, subtilement liées aux poisons de la passion et du désir, sont des choses que nous ne comprenons pas vraiment. Nous croyons qu’elles sont pur plaisir et c’est pour cela que nous les désirons. Ce désir est avidité et le Bouddha nous recommande d’abandonner l’avidité et la passion envers les idées et les objets. « Passion » signifie ici ne vouloir rien d’autre que du plaisir et se laisser ensuite entraîner à aimer ou ne pas aimer ce qui en résulte. Cela signifie que nous nous laissons entraîner par les délicieuses saveurs des sensations, qu’elles soient physiques ou mentales.

Nous devrions finir par réaliser que, lorsqu’une sensation douloureuse devient très forte, nous pouvons encore fort bien la traiter en utilisant l’attention pour empêcher l’esprit de se débattre. A ce moment-là, même si la douleur est grande, nous pouvons la laisser passer. Le corps sera peut-être agité mais l’esprit ne le sera pas. Pour y parvenir, vous devez apprendre à séparer les sensations de l’esprit pendant que vous êtes encore fort et en bonne santé.

Quant aux sensations qui arrivent avec le désir, si nous les accumulons, elles entraînent encore plus de souffrance. Alors, n’allez pas croire qu’elles sont agréables ou confortables parce que ce serait vous illusionner. Vous ne devez jamais oublier que les sensations – quel que soit leur type – sont toutes impermanentes, causes de tensions et impersonnelles. Si vous pouvez laisser aller les sensations, vous perdrez toute attirance pour les formes, les sensations, les perceptions, les pensées et la conscience sensorielle, qui sont porteuses de sensations de plaisir. Mais si vous n’observez pas cela en profondeur, vous resterez avides de sensations.

Essayez d’être pleinement conscient quand l’esprit est dans cet état d’avidité. Est-il libre ? Est-il paisible ? S’il est attaché, vous ne manquerez pas de voir qu’il est sale et empoisonné parce qu’il a commis l’erreur de se saisir des choses. Dès que la douleur apparaît, il s’agite. Si l’esprit s’enthousiasme pour les trois sortes de sensations – agréable, désagréable et ni-agréable-ni-désagréable – il devra supporter l’insatisfaction et la souffrance. Pour ne pas nous saisir des choses, nous devons voir clairement leur impermanence, la souffrance qu’elles engendrent, et le fait que le corps et l’esprit ne sont pas « moi ». Dès lors, que nous tournions le regard vers l’extérieur ou l’intérieur, nous ne nous saisirons pas des choses. Nous serons vides, vides grâce au non-attachement. Nous aurons conscience que l’esprit ne souffre plus d’insatisfaction. Plus nous regarderons vers l’intérieur, plus nous verrons que l’esprit est véritablement libre de tout attachement.

Voilà comment nous nous libérons de l’insatisfaction et de la souffrance. C’est la façon la plus simple de se libérer mais, si nous ne comprenons pas vraiment ce fonctionnement de l’esprit, c’est la plus difficile. Vous devez donc absolument continuer à travailler au lâcher-prise. Dès l’instant où l’esprit s’empare de quoi que ce soit, faites en sorte qu’il lâche. Et remarquez bien une chose : quand vous dites à l’esprit de lâcher, il lâche ; quand vous lui dites d’arrêter, il s’arrête ; quand vous lui dites de se vider, il se vide vraiment.

Cette méthode qui consiste à observer l’esprit est extrêmement utile mais nous sommes rarement suffisamment intéressés par la méditation au point de devenir experts et capables de nous libérer de nos souffrances. Nous pratiquons le plus souvent de manière nonchalante, désinvolte, sans savoir quels points ont besoin d’être corrigés, à quel moment il faut lâcher prise et ce qu’il faut lâcher. C’est pourquoi nous continuons à tourner en rond, prisonniers de la souffrance et de l’attachement.

Nous devons découvrir comment lâcher la souffrance à tout moment. Nous ne pouvons pas nous contenter de vivre, dormir et manger à notre aise. Nous devons trouver le moyen d’examiner et de comprendre toute chose en utilisant notre attention et notre discernement pour voir que tout est vide de « soi ». Ce n’est qu’alors que nous pourrons lâcher nos attachements. Si nous n’avons pas pleinement réalisé cela avec une véritable attention et avec sagesse, notre pratique ne pourra absolument pas nous conduire au-delà de l’insatisfaction et de la souffrance.

Tous les poisons mentaux – les seize qui sont mentionnés dans les textes – sont difficiles à abandonner. Mais ils n’apparaissent pas tous les seize en même temps, seulement un par un. Alors, si vous savez les reconnaître à l’instant où ils apparaissent, vous pouvez les laisser passer. La première étape consiste à clairement reconnaître leur aspect parce qu’il faut que vous compreniez qu’ils vous brûlent à chaque fois qu’ils apparaissent. Si vous constatez que vous êtes triste ou contrarié, il est facile de voir que c’est leur œuvre. Si vous êtes joyeux, c’est moins facile à détecter. Vous devez donc commencer par apprendre à reconnaître l’esprit quand il est dans un état « normal » et faire en sorte que vos paroles et vos gestes restent aussi dans cette normalité. Cette « normalité » c’est être libre de toute réaction d’attirance ou de répulsion envers ce qui se présente. C’est une question de pureté dans la vertu, exactement comme lorsque nous pratiquons la modération au niveau des sens. La normalité est le fondement de base. Si l’esprit n’est pas dans un état de normalité, c’est-à-dire s’il ressent de l’attirance ou de l’aversion, cela signifie que votre modération au niveau des sens n’est pas pure. Par exemple, quand votre œil entre en contact avec un objet ou que vos oreilles entendent un son, vous n’êtes pas perturbé tant que vous ne ressentez pas de gêne ou de vraie douleur mais, si vous êtes distrait et inattentif, quand la douleur grandira vos préceptes en souffriront et vous finirez dans la plus grande agitation.

Alors, ne sous-estimez rien, pas même les plus petites choses. Utilisez votre attention et votre discernement pour laisser aller les choses, pour les faire disparaître et pour continuer à travailler à votre observation intérieure. Ensuite, même si quelque chose de grave se produit, vous serez capable de le laisser passer ; si vos attachements vous pèsent, vous pourrez aussi les lâcher ; et s’ils sont nombreux, vous pourrez en diminuer le nombre.

Il en va de même pour les poisons mentaux intermédiaires que l’on appelle « les cinq obstacles ». Toute attirance pour les objets visuels, les sons, les odeurs, les saveurs et les sensations tactiles correspond à l’obstacle du désir sensoriel. Si on n’aime pas ce que l’on voit, entend, sent, goûte ou touche, c’est l’obstacle de la négativité. Ces obstacles du désir sensoriel et de la négativité polluent l’esprit ; il devient agité, dispersé, incapable de se calmer. Essayez d’observer l’esprit quand il est dominé par les cinq obstacles pour voir s’il souffre ou pas. Etes-vous capable de reconnaître des poisons mentaux intermédiaires quand ils enveloppent votre esprit ?

L’obstacle du désir sensoriel est comme un colorant qui trouble l’eau claire et l’assombrit – et, quand l’esprit est sombre, il souffre. La négativité en tant qu’obstacle, c’est l’irritabilité et l’insatisfaction. L’obstacle de la paresse et de la torpeur est un état de somnolence et de léthargie : on n’a envie de rien faire, on s’enferme dans le sommeil et dans un oubli paresseux. Tous les obstacles, y compris les deux derniers – agitation-inquiétude et doute – recouvrent l’esprit de leur ombre. Voilà pourquoi vous devez être résistants pour les combattre à tout moment et les examiner pour pouvoir affaiblir et laver l’esprit de toute forme de poison mental, du plus grossier au plus subtil, en passant par tous les stades intermédiaires.

La pratique du Dhamma est une tâche très délicate qui nécessite que vous utilisiez toute votre attention et tout votre discernement pour sonder et comprendre le corps et l’esprit. Quand vous observez le corps de l’intérieur, essayez de voir combien il est impermanent, source de souffrance et rien d’autre qu’un composé d’éléments physiques. Si vous n’observez pas les choses ainsi, votre pratique ne pourra qu’avancer à tâtons et elle ne vous permettra pas de vous libérer de l’insatisfaction et de la souffrance car les souffrances causées par tout ce que les poisons mentaux concoctent dans l’esprit sont plus que nombreuses. L’esprit nous joue toutes sortes de tours. Parfois on peut avoir une vision claire et profonde grâce à l’attention et au discernement, l’esprit devient lumineux, vide et paisible, et puis les poisons mentaux se faufilent et gâchent tout, enveloppant à nouveau l’esprit dans la plus totale obscurité, de sorte que l’on est distrait et que l’on ne voit plus rien clairement.

Chacun de nous doit trouver des stratégies particulières pour arriver à lire en soi sans se laisser distraire. Le désir, en l’occurrence, est un grand fauteur de troubles, de même que la distraction. Torpeur et léthargie aussi – comme tous les obstacles recensés par le Bouddha – sont des ennemis qui vous barrent la route. Si vous n’avez encore rien vu, c’est parce que ces éléments vous bloquent le chemin et vous encerclent. Vous devez trouver un moyen de les détruire grâce à l’attention juste, c’est-à-dire en utilisant l’esprit de manière habile. Vous devez creuser et explorer, observer pour voir comment ces choses apparaissent, comment elles disparaissent et voir précisément ce qui est impermanent, insatisfaisant et impersonnel. Ce sont des questions que vous devez vous poser sans cesse pour que l’esprit arrive à vraiment trouver la connaissance. Quand on a une connaissance vraie de l’impermanence, on ne peut manquer de lâcher les poisons de l’esprit, le désir et l’attachement ou, du moins, ils commenceront à faiblir et à passer. C’est comme avoir un balai à la main : à chaque fois que l’attachement apparaît, vous le balayez jusqu’à ce que l’esprit ne puisse plus s’attacher à rien car il ne reste plus rien à quoi s’attacher. Vous voyez que tout est impermanent, alors, de quoi allez-vous vous saisir avec avidité ?

Quand vous persévérez dans la méditation en profondeur pour voir en vous l’impermanence, l’insatisfaction et l’impersonnalité, l’esprit se sent bien parce que vous avez relâché vos attachements. C’est le cadeau merveilleux du Dhamma : un bien-être du corps et de l’esprit, complètement libre de toutes les complications des poisons mentaux. C’est vraiment particulier. Avant, l’ignorance qui obscurcit l’esprit vous faisait errer, être fasciné par les belles choses, par les sons, etc., de sorte que les poisons mentaux, le désir et l’attachement vous gardaient sous leur joug. Mais maintenant, l’attention et le discernement brisent cette fascination en voyant qu’il n’y a pas de « soi » dans ces choses, qu’il n’y a absolument rien de réel en elles. Elles apparaissent puis disparaissent à chaque instant et c’est tout. Il n’y a pas le moindre « moi » ou « mien » en elles. Une fois que nous le savons vraiment, avec attention et discernement, nous balayons tout cela et ne laissons que le pur Dhamma, sans absolument aucun sentiment de « soi ». Nous ne voyons rien que l’impermanence, l’insatisfaction et l’impersonnalité, sans plaisir ni douleur.

Le Bouddha a enseigné que « tout est dépourvu de soi » – sabbe dhamma anatta. Aussi bien les phénomènes composés et ceux qui ne le sont pas (c’est-à-dire le nibbana, le transcendant) sont dépourvus de soi. Il n’y a que le Dhamma. Ce point est très important. Il n’y a pas de sentiment de soi, il n’y a que ce qui est et c’est le Dhamma. Ce n’est pas l’extinction comme la voient les nihilistes ; c’est l’extinction de tout attachement au « moi » et au « mien ». Tout ce qui reste, c’est l’au-delà de la mort, le Dhamma éternel, la particularité de ne jamais mourir, d’être libre de la naissance, du vieillissement et de la mort. Tout reste comme avant, sans être annihilé nulle part ; les seules choses annihilées sont les poisons mentaux ainsi que toute forme d’insatisfaction et de souffrance. On appelle cela suñño, la vacuité, parce que c’est vide de « moi ». Cet au-delà de la mort est la véritable merveille que le Bouddha a découverte et enseignée pour nous éveiller.

C’est pourquoi il est tellement bon de tourner le regard vers l’intérieur pour pénétrer clairement l’impermanence, l’insatisfaction et l’impersonnalité des cinq agrégats car, ce qui reste ensuite, c’est le Dhamma naturel, libre de la naissance, du vieillissement et de la mort. On appelle cela le Dénouement, la Vacuité, l’Inconditionné et tous ces mots signifient la même chose. Ce sont simplement des désignations conventionnelles qu’il faut aussi savoir lâcher pour pouvoir demeurer dans cet aspect de l’esprit, vide de tout sentiment de moi.

Ainsi, la voie, les fruits de la voie et le nibbana ne sont pas des choses que l’on espère trouver dans une vie future en développant maintenant toutes sortes de vertus. Il y a des gens qui ont plaisir à insister sur le fait que le Bouddha avait dû accumuler énormément de vertus – mais vous, alors ? Vous oubliez toutes les vies où vous avez déjà essayé d’atteindre le but, et tout cela à cause de votre stupidité à toujours vous chercher des excuses.

Les principes de base enseignés par le Bouddha comme les quatre fondements de l’attention, les quatre nobles vérités, les trois caractéristiques de l’impermanence, l’insatisfaction et le non-soi, sont ici, en vous, maintenant. Alors continuez à observer de près à l’intérieur pour les voir jusqu’à les connaître parfaitement. Les poisons mentaux, le désir et l’attachement sont en vous aussi, alors observez-les jusqu’à en connaître la véritable nature. Vous serez en mesure de les laisser aller, de ne plus vous en saisir comme s’ils étaient vraiment « vous » ou « vôtres ». Ainsi vous serez libéré de l’insatisfaction et de la souffrance.

Arrêtez de vous trouver des excuses en vous reposant, par exemple, sur les pouvoirs miraculeux d’un certain objet ou en attendant d’avoir développé plus de vertus. Ne pensez pas en ces termes ! Pensez plutôt à l’aspect que prennent les poisons mentaux en cet instant précis : vaut-il mieux les laisser aller ou les suivre ? Si vous les suivez, y aura-t-il insatisfaction et souffrance ? Vous devez trouver la vérité en vous-même pour pouvoir vous libérer de votre stupidité et de la croyance illusoire que cette forme corporelle de souffrance est vraiment le bonheur.

Nous sommes tous piégés par cette illusion parce que nous n’ouvrons pas les yeux. C’est la raison pour laquelle nous devons continuer à discuter de ces questions, donner des conseils et déterrer la vérité, de sorte que vous développiez l’attention et le discernement qui vous permettront de vous connaître. Le fait que vous ayez commencé à voir des choses, à prendre conscience des poisons mentaux et de la souffrance en vous-même, au moins jusqu’à un certain point, est très bénéfique. Il vaut mieux parler de ces choses plutôt que de tout autre chose ; ainsi nous développerons notre connaissance de la souffrance et de sa cause, nous saurons comment méditer sur le corps, les sensations, l’esprit et les formations mentales, de façon à nous défaire de l’insatisfaction et de la souffrance. Nous pourrons ainsi diminuer nos souffrances parce que nous serons en train de lâcher les poisons mentaux qui brûlent l’esprit et l’agitent. Notre attention et notre discernement pourront progressivement éliminer les poisons mentaux et les désirs du cœur.

Si nous suivons vraiment cette pratique qui est la nôtre et que nous arrivons à en obtenir la connaissance, elle diminuera nos souffrances à coup sûr et d’autres seront incités à suivre notre exemple. Inutile de faire de la publicité car ils ne manqueront pas de voir la différence. Inutile de se vanter du niveau que nous avons atteint ou des diplômes que nous avons obtenus. Il n’y a rien de ce genre ici car tout ce dont nous parlons, c’est d’insatisfaction, de souffrance, de poisons mentaux et de non-soi. Si nous avons la connaissance qui naît d’une attention et d’un discernement authentiques, nous pouvons arracher nos poisons mentaux, désirs et attachements, et les bons résultats seront juste là, en nous.

Maintenant que l’occasion nous est donnée, nous devons donc faire un effort délibéré pour progresser. Ne laissez pas votre vie s’écouler dans l’ombre des poisons mentaux, du désir et de l’attachement. Faites un effort pour vous corriger dans ce domaine, jour après jour, instant après instant, et vous ne manquerez pas de progresser dans votre pratique qui consiste à détruire les poisons du mental et à vous défaire de l’insatisfaction et de la souffrance à tout moment. Cette question de sacrifier les poisons mentaux ou de sacrifier votre sentiment de « moi » est très importante parce qu’elle apporte des récompenses : paix, normalité, un sentiment de liberté à chaque instant, juste là, dans le cœur. La pratique vaut donc vraiment la peine que l’on s’y intéresse. Si vous ne vous intéressez pas à une pratique qui consiste à dépister et à détruire les maladies causées par les poisons mentaux, par vos propres insatisfactions et souffrances, vous serez obligé de rester coincé là, à souffrir constamment, en compagnie de tous les autres ignorants de ce monde.

Quand Mara, la tentation, essaya d’arrêter les efforts du Bouddha en lui promettant de le faire empereur de tout l’univers en sept jours, le Bouddha répondit : « J’ai déjà vu la vérité. N’essaie pas de me tromper ou de me tenter ! » Parce que le Bouddha avait la faculté de connaître la vérité ultime des choses instantanément par lui-même, Mara ne pouvait qu’être vaincu à chaque fois. Mais vous ? Etes-vous un disciple du Bouddha ou de Mara ? Quand la tentation se présente, vous vous laissez emporter, vous avalez l’appât, l’hameçon et le bouchon sans le moindre sentiment de lassitude ou de détachement par rapport aux passions du monde. Si nous sommes vraiment des disciples du Bouddha, nous devons aller à contre-courant des poisons mentaux, du désir et de l’attachement ; nous devons avoir de solides fondations dans la vertu, à commencer par la moralité, principe idéal de protection. Nous pouvons alors obtenir la libération de la souffrance en travaillant à partir du niveau des préceptes jusqu’au niveau du calme mental, puis en utilisant le discernement pour voir l’impermanence, l’insatisfaction et l’impersonnalité. C’est un haut degré de discernement, vous savez : c’est la sagesse qui pénètre la vérité du non-soi.

Dans tous les cas, le plus important est que vous ne croyiez pas à la réalité absolue de vos poisons mentaux. Même si votre esprit est encore sous l’emprise de l’ignorance de la vérité ultime et du désir, ne cessez jamais de mettre en œuvre l’attention et le discernement comme outils pour connaître, lâcher prise et nettoyer. Quand ces poisons viennent vous tenter, arrêtez-vous, tout simplement. Lâchez prise. Refusez de les suivre. Si vous les croyez quand ils vous encouragent à vous saisir des choses, vous continuerez à être brûlé et agité par le désir. Mais si vous ne vous en saisissez pas, les désirs de l’esprit se dénoueront peu à peu, diminueront et finalement cesseront.

Par conséquent, quand vous entraînez votre esprit, vous devez prendre le désir comme terrain de bataille, de la même façon que vous traiteriez une accoutumance à la drogue : si vous n’êtes pas déterminé à sortir vainqueur, il n’y a aucune chance pour que vous cessiez d’en être l’esclave encore et encore. Nous devons utiliser l’attention comme une armure et le discernement comme une arme capable de trancher et de détruire nos désirs. De cette manière, notre pratique progressera régulièrement, nous permettant de rester attentif aux poisons mentaux, au désir et à l’attachement avec de plus en plus de précision.

Si, dans votre pratique, vous parvenez à lire et à comprendre l’esprit, vous trouverez la voie sur les traces des Nobles Eveillés. Mais, tant que vous ne verrez pas la voie, vous croirez qu’il n’y a pas de voie, pas de fruits de la pratique, pas de nibbana. Ce n’est que quand vous pourrez laisser aller les poisons mentaux que vous saurez. Vous devez vraiment être capable de les laisser aller pour découvrir par vous-même que la voie, les fruits de la voie et le nibbana existent vraiment et peuvent vraiment libérer de l’insatisfaction et de la souffrance. C’est une chose que vous devez connaître par vous-même. C’est intemporel : quelle que soit l’heure ou la saison, à chaque fois que vous avez assez d’attention pour vous arrêter et lâcher prise, la souffrance est absente. Quand vous vous exercez à cela souvent, de plus en plus fréquemment, les poisons mentaux s’affaiblissent progressivement. Voilà pourquoi le Dhamma est ehipassiko – une chose que vous pouvez inviter les autres à venir voir car tous ceux qui pratiquent ainsi peuvent se défaire des poisons du mental et de la souffrance. S’ils méditent jusqu’à voir l’impermanence, l’insatisfaction et l’impersonnalité, ils n’auront plus d’attachements et leur esprit deviendra Dhamma, deviendra libre.

Il est inutile de vous passionner pour quoi que ce soit venant de l’extérieur – des entités, des esprits ou quoi que ce soit – parce que le succès dans la pratique se situe juste ici, dans votre cœur. Regardez-y en profondeur jusqu’à pénétrer clairement jusqu’à vous-même, balayer tous vos attachements et vous aurez cet ehipassiko en vous. « Venez voir ! Venez voir ! » Mais s’il reste des poisons mentaux, ce sera : « Venez voir ! Venez voir les poisons qui me brûlent ! » C’est vrai dans les deux sens, vous savez. Si vous laissez aller les poisons du mental, si vous lâchez prise et vous vous arrêtez, c’est : « Venez voir comme les poisons ont disparu, comme l’esprit est vide ici et maintenant ! » C’est quelque chose que chacun peut connaître, quelque chose que vous pouvez connaître parfaitement par vous-même sans grande difficulté.

Se tourner vers l’intérieur pour examiner l’esprit n’est pas si difficile, vous savez. Il est inutile de voyager bien loin pour le faire. Vous pouvez l’observer à tout moment, dans n’importe quelle position. Le vrai comme le faux sont là, en vous mais, si vous ne vous étudiez pas en profondeur, vous n’en serez pas conscients. Cela parce que vous passez tout votre temps à étudier des choses extérieures, des choses du monde que les gens dans le monde étudient. Si vous voulez étudier le Dhamma, vous devez vous tourner vers l’intérieur et observer de près le corps, les sensations, l’esprit et ses facultés, jusqu’à arriver à cette vérité : le corps n’est pas vous ni vôtre ; il est impermanent, insatisfaisant et impersonnel. Les sensations sont impermanentes, insatisfaisantes et impersonnelles. L’esprit est aussi impermanent, insatisfaisant et impersonnel. Observez ensuite le Dhamma des facultés mentales : elles sont impermanentes et insatisfaisantes. Elles apparaissent, durent un temps puis disparaissent. Si vous ne vous en saisissez pas, si vous arrivez à vous libérer de tout sentiment de « moi » ici, au niveau des facultés mentales, l’esprit est libéré.

Si vous comprenez bien les choses, l’esprit est facile à diriger ; sinon, c’est le contraire. C’est comme appuyer sur un interrupteur : si vous appuyez sur « allumer », la lumière est tout de suite là ; si vous appuyez sur « éteindre », il fait tout de suite sombre. Il en va de même pour l’esprit : si votre compréhension est erronée, il est obscur ; si votre compréhension est juste, il est illuminé. Alors, regardez pour voir s’il y a quoi que ce soit qui vaille la peine que l’on s’y attache. Si vous regardez vraiment, vous verrez qu’il n’y a rien car tout ce à quoi vous pourriez vous attacher est porteur d’insatisfaction et de souffrance : ignorance de la vérité, spéculation mentale, rêverie, opinions arrêtées sur soi ou sur les gens, bavardage inutile, « actualités » incessantes. Mais si vous vous concentrez sur l’investigation profonde de l’esprit, il n’y a rien, rien d’autre que lâcher prise pour être vide et libre. C’est là que le Dhamma apparaît aisément, aussi aisément que les poisons mentaux apparaissent de l’autre côté – simplement, vous regardez maintenant les choses sous un angle différent et vous avez le choix : voulez-vous l’angle sombre ou l’angle lumineux ? Devriez-vous vous arrêter ou continuer à courir ? Devriez-vous être vide ou empêtré ? C’est à vous de décider, en vous.

Le Dhamma est quelque chose de merveilleux et d’étonnant. Si vous comprenez bien les choses au départ, vous pouvez comprendre jusqu’au bout du chemin. Si vous tombez sur une difficulté à un certain moment, vous pouvez examiner les choses de près et méditer pour voir ce qui vous attache encore. Continuez à vous interroger ainsi dans tous les sens et tout s’éclaircira.

Nous ne savons déjà que trop bien suivre la voie des poisons mentaux et du désir ; à présent, nous devons plutôt suivre la voie de l’attention et du discernement. Ne cessez pas d’observer les poisons mentaux et de les remettre en question ; ne vous soumettez pas à eux facilement. Vous devez résister à leur pouvoir et refuser de tomber dans leurs pièges. C’est alors que vous en arrivez à vraiment comprendre les choses et quand vous comprenez vraiment, tout s’arrête. Le désir s’arrête, vos vagabondages s’arrêtent, les « j’aime » et les « je déteste »… Cette compréhension balaye tout. Mais si vous ne comprenez pas, vous continuez à amasser des choses jusqu’à être complètement entraîné dans le flot de l’action dispersée : on arrange ceci, on ajuste cela, on veut ceci et cela, on laisse le sentiment de « moi » relever sa vilaine tête.

Voyez les choses ainsi : vous êtes un grand théâtre qui présente un drame très réaliste dont le héros, l’héroïne et les méchants – tous des suppositions conventionnelles – sont en vous. Si vous arrachez toutes les suppositions conventionnelles et les étiquettes, il ne vous reste que le Dhamma : liberté et vacuité. Et être simplement libre et vide de tout sentiment de « moi » suffit à mettre fin à tout le drame.